Des économies sur le dos de l’âne.


La famille a besoin d’argent. Parents et enfants inspectent tous les jours le sol de la cuisine, à la recherche du moindre centime. Ils se lamentent. L’un d’eux est en train de tout bouffer. C’est un glouton et il est bête. Ils veulent le punir.

Ils ont soudain une idée. Sur le ventre du fautif, ils attachent deux poches pour faire glisser des pièces à l’intérieur. Grâce aux économies effectuées tous les jours, les deux poches gonflent et les sous n’en sortent plus.

L’ âne de la famille garde et transporte les économies. Il a des sacs remplis de pièces de monnaie. Aux repas, on lui sert des flocons d’avoine. Maintenant, il n’a plus faim. On lui met toujours de l’argent dans les poches. C’est le plus fortuné du quartier et de la ville. A quoi bon ! L’âne ne peut pas dépenser le moindre sou.

Un jour, il ne peut plus recevoir une seule pièce. Il est plein aux as. On l’empoigne et le secoue pour le faire avancer. Rien à faire !
Où placer l’argent maintenant ? Il faut amener l’âne à la Caisse d’Epargne.

La famille le conduit par la bride. La banque ouvre bien grand ses portes. L’âne, ovationné par une foule d’employés, se fraie un chemin jusqu’à la caisse. Les sacs sont vidés et remplissent deux coffres blindés. Le banquier fait un discours pour remercier l’âne et sa famille.

La famille s’en revient. L’âne n’a plus mal au dos. En chemin, personne ne lui parle. On ne le laisse plus rentrer dans la maison. L’a t-on abandonné ? Ne lui a t-on pas pardonné ? Peut-il encore compter sur les siens ?

La famille s’est consulté. Ils sont tous d’accord. On peut bien se passer de l’âne. Tous les ânes quittent un jour leur famille. Pour l’argent, une tire-lire fera l’affaire. Ils n’auront plus de bête à garder à la maison. Il vendront l’âne et mettront l’argent dans la tire-lire.

Hervé GOSSE

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