L’arrivée au château du Landgrave, prévenu par un messager qui les avait devancés, se déroula selon le rituel dû à un personnage de haut rang… Ce qu’était la fille du Burgrave …
Deux hérauts à cheval arrivèrent pour l’accueillir et lancèrent un appel profond de leurs trompes d’apparat auxquels répondirent d’autres sonneries venues des hautes tours qui dominaient l’ensemble des bâtisses…
Dame Hildegarde vint en personne accueillir sa filleule, accompagnée de son beau-frère le Landgrave et de toute leur imposante suite…
Robert, après avoir exécuté une inclination fort appuyée, indiquant le salut féodal auquel cette révérence renvoyait, se présenta…
La lourde cuirasse aux armes de lion que portait le Seigneur des lieux l’impressionnait vivement..
Lui qui n’avait vécu depuis longtemps que dans des commanderies, à l’abri de ce monde séculier, avait oublié les dorures et les bonnes manières d’un monde pourtant auquel il avait appartenu…
La vie chez le Burgrave paraissait bien rustique à côté de celle qui était menée dans cette cour…
Après ces salutations d’usage, chacun se sépara en groupes disparates pour aller rejoindre ses afférences …
Lorsqu’elles se retrouvèrent dans la chambre attribuée à la noble invitée, où brûlait un petit feu de cheminée, la marraine et sa filleule Edda évoquèrent le voyage.
Il n’avait pas semblé aux dires de la douce jeune fille, trop épuisant. Puis aussitôt après et de manière impromptus ses propos convergèrent sur Robert, à la grande surprise de son auditrice…
A la tonalité enjouée que prenait la jeune locutrice en étalant sa narration, aux louanges débordants dont elle émaillait son récit, Dame Hildegarde comprit les penchants passionnés qui animaient sa filleule…
Ceci lui permit de donner sa première leçon de bonne éducation … A savoir que l’on n’étale pas outrageusement ses sentiments devant quelqu’un qui ne vous a "a priori" rien demandé… L’élève en prit bonne note puis après s’être changées, elles se rendirent dans la grande salle à manger du donjon où un repas démesurément copieux allait être servi…
Après avoir ripaillé dans des agapes où force volailles, pâtés et douceurs avaient été engloutis à la grande joie des dîneurs, certains convives, choisis sur le volet, parmi lesquels Robert Essen, furent conviés à passer dans une autre salle…
Là , dans une sorte de boudoir étonnamment agrémenté par des tentures rehaussées de parures dorées ils s’installèrent moelleusement…
Malgré le voyage la jeune Edda put improviser un concert à la harpe qui transporta ses auditeurs…
Durant ce récital, à la lumière des bougeoirs, Robert put observer le regard de loup que lançait sur la jeune fille le Landgrave, comme s’il était prêt à la dévorer sur le champ…
Il comprit alors, par la jalousie qu’entretenait ce regard inhumain, qu’un sentiment démentiel, forgé par l’amour, façonnait son cœur de puceau, d’une manière inattendue…
(A Suivre...)