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DIVERDE
Envoyé le :  1/3/2023 16:08
Plume de soie
Inscrit le: 4/2/2023
De:
la photo
LA PHOTO

Helmut KOELER regardait une émission de la chaîne ARTE, intitulée « les Albums photos d’Auschwitz » diffusée en 2015..
On y voyait les photos des arrivées de juifs sur le quai de la gare avant la sélection, comme les photos des SS hommes et femmes, prenant du bon temps durant leur temps libre, montrant ainsi l’insupportable banalité de leur quotidien dans cet enfer.
Sur une des photos prise sur le quai de la gare du camp d’Auschwitz, au milieu de la foule des déportés, il remarqua deux enfants, incontestablement deux frères, pouvant avoir entre 7/8 ans pour l’aîné, 5/6 ans pour le cadet.
Ils avaient l’air seuls, hébétés et désemparés, ils se tenaient par la main en se demandant surement où ils étaient tombés. Apparemment, vu leurs costumes et leurs manteaux à brandebourg il s’agissait de deux petits juifs hongrois d’une famille aisée.
Il fut intrigué par la vue de ces deux enfants et de leurs vêtements. En effet il se rappela que chez sa grand-mère il y avait une photo de son père et de son oncle sensiblement au même âge que ces gamins, habillés de la même façon. Etait-ce une mode de l’époque ? Si son père et son oncle avait 7 et 5 ans la photo trônant sur la cheminée de la vielle maison de Grobenzell datait de 1943/44.

Mais il ne connaissait pas grand-chose de cette époque, les allemands avaient occulté cette période et tout ce qui pouvait rappeler le passé nazi de la population. Il en était de même à la maison, où ses parents n’en parlaient jamais, pas plus que ses grands-parents.
Mais en 1980, Helmut avait 20 ans, cette période, bien que non enseignée en Allemagne commençait à être connue.
Après le procès de Nuremberg qui, en condamnant les principaux responsables de cette tragédie que fut la 2e guerre mondiale, eut pour conséquence d’acquitter le peuple allemand, il y avait eu le procès Eichman en 1963, celui de Francfort connu comme le procès d’Auschwitz en 1965, la gifle donnée par Beate Klasfeld au Chancelier Kinsinger (qui avait été un haut dignitaire nazi) en 1968, faisait que la génération d’après-guerre commençait à en parler, mais ce n’était pas encore le cas chez les Khoeler.
Un jour, Helmut demanda à son grand-père ce qu’il avait fait pendant la guerre. Ce dernier lui répondit laconiquement « j’ai combattu » « ou çà » insista Helmut, « à l’est contre les communistes », « oui mais pourquoi les avons-nous attaqué ? » « Parce qu’ils représentaient un danger pour l’occident » « oui mais alors dans ce cas, pourquoi avoir attaqué les pays occidentaux comme la France, la Belgique, l’Angleterre ? » « Tu poses trop de question Helmut, je ne veux plus parler de ça » La discussion s’arrêta là et ils n’en reparlèrent plus jamais.

Puis, son grand père mourut en 1989, sa grand-mère le suivit deux ou trois ans plus tard, il n’eut plus jamais l’occasion de reparler de cette période avec eux. Bien que les aimant beaucoup, et c’était réciproque, Helmut sentait qu’ils avaient eu une certaine réticence à parler de leur passé. Il ne sut jamais qu’elle avait été leur jeunesse, comment ils s’étaient rencontrés, leurs difficultés à élever leurs enfants, car l’après-guerre fut difficile pour le peuple allemand.
Cette photo entrevue sur l’écran, le taraudait, il fallait qu’il retourne dans la vielle maison familiale où vivait encore sa vieille tante, Katarina la sœur cadette de son père et de son oncle.
Ses parents étant décédés dans un accident de la route au début des années 2000, son oncle s’étant installé en Australie, seule sa tante pouvait lui apporter quelques éclaircissements concernant cette période. Il se promit d’aller la visiter avant qu’elle ne disparaisse elle aussi, encore qu’elle n’avait que 72 ans.

La distance entre Strasbourg, où Helmut vivait depuis qu’il s’était marié avec Anita une Française qu’il avait rencontré en Allemagne où elle travaillait comme beaucoup de frontaliers français, et Grobenzell était de 350 Km environ que l’on faisait facilement en 4 heures. Il passa un coup de fil à sa tante avec qui il était resté en contact pour lui annoncer sa venue et partit en début d’après-midi.
Grobenzell était un petit village pas trop loin de Munich, qui avait été miraculeusement épargné pendant la 2e Guerre, mais sa population avait fortement augmenté depuis quelques années car beaucoup de Munichois en avaient fait leur banlieue. Il ne reconnut pas grand-chose en arrivant, la maison familiale se trouvait à la sortie du village. Après avoir emprunté la Hauptstrass, qui voulait simplement dire « Grand-rue » il tourna à droite. Si à l’époque de son adolescence, la maison familiale était quelque peu isolée, ce n’était plus le cas actuellement. Elle était entourée de lotissements, si bien qu’il eut un peu de mal à la retrouver. C’était une grande maison à deux étages plus la soupente, elle était entourée d’un jardin et cernée d’un mur d’enceinte de près de 2 mètres. Le portail était ouvert il entra dans l’allée en klaxonnant pour avertir sa tante. Il était près de dix-huit heures, sa tante l’attendait sur le perron et l’accueilli à bras ouvert..
- Helmut mein kleiner hier bist du endlich (Helmut mon petit te voilĂ  enfin)
- Désolé tante Katarina je devrais venir un peu plus souvent, mais tu sais ce que c’est, le travail, les enfants …. Enfin je vois que tu es en forme, dit-il en l’embrassant..
- Je n’ai pas à me plaindre, danke gott (grâce à dieu), mais dis-moi qu’est ce qui t’amène ? tu avais l’air préoccupé au téléphone, tout va bien chez toi ?
- Oui, oui Katarina, tout va bien, je suis venu parce que je voulais éclaircir certains points sur le passé d’ouma et d’oumpa,( grand-mère et grand-père) mais on pourra en discuter plus tard. Tu m’as l’air en pleine forme, tout va bien, Toujours célibataire ?
- Oh Helmut ! à mon âge ! Mais dis-moi parle-moi un peu de tes enfants, tu as des photos, ça fait un moment que je ne les ai pas vu, et comment va Anita ? Elle te fait toujours de bons plats ?
- Comme tu peux le constater, dit-il en montrant son petit bedon.
- Je ne cuisine pas aussi bien qu’elle, mais j’espère que tu aimeras ce que je t’ai préparé. Mais tu dois être un peu fatigué. Monte te rafraichir et te reposer un peu, je t’ai préparé ta chambre.

Helmut pris son sac de voyage et monta à l’étage, il entra dans la chambre de son enfance où rien n’avait changé, il y avait encore les posters de l’équipe du Bayern de Munich dont il était un fervent supporter. Il s’allongea sur le lit à une place, ferma les yeux en espérant se retrouver 20 ou 30 ans auparavant mais il s’endormit tout aussitôt.
Soudain il entendit qu’on l’appelait « Helmut » « Helmut » mein kleiner, c’est prêt. Encore dans un demi-sommeil, il pensa que c’était sa mère, mais il se réveilla complètement, et répondit à sa tante. Avant de la rejoindre il passa, un coup de fil à sa femme pour lui dire qu’il était bien arrivé et passa se rafraîchir un peu dans la salle de bains, qui elle aussi était restée dans son jus, comme disent les agents immobiliers lorsqu’ils vous proposent une maison à rafraîchir.
Après avoir fait honneur au repas que sa tante lui avait préparé, il jeta un coup d’œil circulaire dans la pièce et dit
- Il me semble que tu n’as pas touché grand-chose dans cette maison.
- Pour ainsi dire, rien, tout est resté en l’état comme du temps des parents, je ne suis même jamais montée au grenier.
- Eh bien on trouvera peut-ĂŞtre quelque chose.
Helmut se dirigea vers la cheminée, où la photo de son père et de son oncle en costume brandebourgeois trônait toujours. Plus il la regardait et plus il voyait les visages des petits juifs hongrois se superposer à ceux de son père et de son oncle, bien que contrairement à eux, son père et son oncle souriaient.
- Tu connais l’histoire de cette photo ? demanda-t-il à sa tante
- Oh non, tu sais je l’ai toujours vu là, elle a dû être prise avant que je sois née, ou peu de temps après. Mais pourquoi me demande-tu-çà ? qu’a-t-elle de particulier ?
- Oh rien, il me semble l’avoir vu ailleurs… Sais-tu ou grand-père était mobilisé ?
- Non. Tu sais bien que ce sujet était interdit à la maison. Je me souviens seulement qu’un jour, du temps du procès de Francfort ou d’Auschwitz, comme on disait, et alors que les accusés se défendaient en disant qu’ils n’avaient fait qu’obéir aux ordres, il dit :
- « comme tout le monde, et ce lâche s’est suicidé. » j’avais alors 22 ans, et on parlait de plus en plus du passé et de l’attitude de nos parents durant cette époque, j’ai compris que le « lâche » dont il parlait était Hitler qui s’était suicidé dans son bunker, mais j’ai eu l’impression que s’il lui reprochait de ne pas avoir fait face à ses responsabilités, il n’avait pas l’air de lui reprocher la politique qu’il avait mené. J’aurais bien voulu lui poser des questions à ce sujet, mais tu sais comment était ton grand-père, je n’avais pas envie de me faire rabrouer, aussi je n’ai rien dit, c’est la seule fois que j’ai pu un peu entrevoir son passé.
Non, maintenant que tu m’en parles j’ai encore eu l’occasion de deviner où il avait servi pendant la guerre. C’était pendant les évènements qui se déroulaient en Pologne dans les années 1980 il commenta : « ces Polonais ne sont jamais contents ça m’étonnerait pas qu’il y ait des juifs derrière tous ces mouvements ; » j’aurais voulu lui demander pourquoi il disait cela, mais là encore je n’ai pas osé, et puis à vrai dire j’avais peur de découvrir quel avait été son passé, ses idées, et j’ai préféré ne rien savoir.
- Donc selon toi, il a fait la guerre à l’Est comme il a dit.
- Oui je crois, puisqu’il a été fait prisonnier par les soviétiques, et qu’il n’a été libéré qu’après 1953, suite à la mort de Staline. J’avais 10 ans lorsque je l’ai vu pour ainsi dire pour la première fois, car je n’avais aucun souvenir de lui, ce n’était pas le cas de ton père et de ton oncle, qui eux s’en souvenaient mais se demandaient si c’était bien leur père qui était de retour, car il ne ressemblait plus du tout à celui de leur souvenir. Il a mis quelques temps avant de se réhabituer à nous, et nous à lui, mais tout a repris son cours petit à petit, sauf qu’il ne parlait pas beaucoup, et surtout pas de ce qu’il s’était passé. Et même lorsqu’on allait au bourg faire quelques courses, et qu’il croisait quelqu’un de sa génération, homme ou femme, il disait tout juste bonjour, et ne s’attardait jamais pour discuter avec eux, et j’avais l’impression que çà arrangeait tout le monde.
- C’est vrai, maintenant que tu m’en parles, je le voyais rarement avec les gens du village. Même lorsqu’il venait me regarder jouer au foot, il était toujours seul dans son coin.
- Mais pourquoi t’intéresses-tu au passé maintenant.
- Oh tu sais ce que c’est, arrivé à un certain âge, on voudrait savoir d’où l’on vient, quelle est l’histoire de notre famille… Enfin toutes ces choses, comme disent les généalogistes, on voudrait retrouver nos racines..
- Je ne sais pas si tu trouveras quelque chose au grenier où comme je te l’ai dit je ne suis plus monté depuis longtemps, en tout cas pas depuis la mort des parents, mais je me souviens que ton grand-père y passait des journées entières à bricoler où à faire je ne sais quoi. Et toi y es-tu déjà monté ? avec ou sans lui ?
- Non, enfin pas vraiment. Un jour grand-mère m’a envoyé le chercher pour dîner. J’ai tapé à la porte du grenier, mais comme personne ne répondait, j’ai voulu ouvrir, mais la porte était fermée à clé. Je me suis dit qu’il était ailleurs et je suis redescendu, mais pendant que je redescendais j’ai entendu la porte du grenier s’ouvrir et grand-père qui en sortait. Je me suis demandé pourquoi il ne m’avait pas ouvert, ne m’avait-il pas entendu ? Mais pourquoi fermer la porte à clé ? Je me promis de le lui demander, mais le lendemain j’avais un match, et puis quelques jours après, les vacances étaient finies, et cela m’est complètement sorti de l’esprit. Donc pour répondre à ta question je n’y suis jamais allé, et comme il ne me l’a jamais proposé, je me suis mis dans la tête que c’était « verbotten » (interdit) comme il disait souvent. En fait maintenant que j’y pense, il y avait beaucoup de choses « verbotten »
- Ah çà tu peux le dire ! et pour moi qui étais une fille il y en avait encore plus, cela a dû décourager plus d’un garçon du coin.
Ils continuèrent ainsi à parler du temps où son père et son oncle étaient encore à la maison, du grand-père taiseux, de la grand-mère guère bavarde non plus. Il demanda ce que son grand-père avait fait après être revenu, elle lui dit que la mairie l’avait employé comme Garde-Champêtre, ce qui lui convenait parfaitement car il partait pour toute la journée, et surtout, parce qu’il était seul.
- J’aurais bien aimé savoir ce qu’il pensait de cette période, ce qu’il avait fait pendant la guerre, sur sa période de captivité, enfin j’aurais bien aimé le connaître un peu mieux.
- Eh bien pas moi, j’aurais trop peur d’apprendre des choses que je voudrais ignorer.
- Malgré tout j’ai de bons souvenirs de lui, lorsqu’il m’amenait à la pêche, lorsqu’il me regardait jouer au foot, oh bien sûr ce n’était pas un grand démonstratif, mais il avait une façon bien à lui de m’ébouriffer les cheveux qui voulait tout dire. Je savais qu’il nous aimait Franz, toi et moi, bien qu’on n’employait pas beaucoup ce mot, d’ailleurs, moi non plus je ne le dit pas souvent, ce doit être la pudeur ou l’éducation. Bon je vais aller me coucher, mine de rien la route fatigue, et puis le repas que tu as fait n’a rien arrangé. A demain tante.
- A demain Helmut.
Le lendemain Helmut se réveilla frais et dispos, il regarda l’heure, il était huit heures du matin, il entendait sa tante s’affairer dans la cuisine. Il se leva, passa à la salle de bain prendre une douche, et descendit la rejoindre.
- Qu’est- ce que tu prends le matin, café, thé, lait ?
- Un grand bol de café m’irait très bien, je vois que tu as sorti la confiture et le pain, ce sera parfait. Il déjeuna sans rien dire, perdu dans ses pensées.
- Bien je vais te laisser un peu seul, le temps d’aller faire quelques courses.
- D’accord, prends ton temps, j’en profiterais pour faire un tour au grenier, au fait, il est ouvert ? la clé est quelque part ?
- Ah je t’ai dit que je n’y suis jamais montée, mais je vois mal ton grand-père laisser la clé sur la porte, vu que c’était « verbotten » comme tu dis, elle doit être dans un tiroir quelconque.
- Ne t’en fais pas, je me débrouillerais.
Sa tante partie, il monta au grenier qui se trouvait au 3e étage de la maison. Effectivement celui-ci était fermé à clé, et comme de bien entendu, celle-ci n’était pas sur la porte. Il redescendit dans la cuisine, ouvrit les tiroirs mais ne trouva aucune clé pouvant correspondre à la porte du grenier, en fait c’était une vielle serrure où l’’on pouvait voir à travers le trou, il n’aurait aucune peine à l’ouvrir, le tournevis qui était dans le tiroir ferait l’affaire.
Il remonta, et après trois ou quatre tentatives réussit à ouvrir la porte. Il l’ouvrit, et s’arrêta un instant sur le seuil, embrassant la pièce du regard. Elle n’était pas trop encombrée, un établi, formé par une large planche posée sur deux tréteaux occupait la presque totalité du mur à droite de la porte, sur l’un des autres murs se trouvait des étagères avec toutes sortes d’outils, de vis, de clous, enfin tout le matériel d’un bricoleur, et enfin dans un coin se trouvait une grosse malle et quelques cartons.
Il ouvrit la malle avec appréhension, ne sachant trop sur quoi il allait tomber, mais il ne vit que des vieilleries qui n’avait aucun lien avec son passé militaire, il est vrai qu’il avait passé huit ans en captivité et qu’il était revenu avec ses vêtements de prisonnier. Il découvrit cependant sa tenue de garde champêtre et un vieux Luger, qui devait être la cause du fameux « Verbotten ». Ce n’est pas là qu’il allait apprendre ce qu’il avait fait pendant la guerre.
Il se dirigea vers les cartons, en ouvrit un et y trouva deux ou trois petites maisons de bois qui semblaient faire partie d’un ensemble plus important. Et de fait les autres cartons contenaient d’autres objets comme les miniatures du jeu de Monopoly. Dans un autre carton il découvrit un ensemble de rail, dans un autre, cinq ou six wagons et une locomotive. Oui c’est ça, ce devait être la maquette d’un petit village avec sa gare. C’est bizarre, se dit-il, il voyait mal son grand-père construire des maquettes et y jouer. Et surtout pourquoi ne me l’avait-il jamais montrée ? Avait-il honte de son passe-temps? Mais il aurait pu me dire qu’il l’avait fait pour moi ! Non vraiment je ne comprenais pas. Dans l’un des cartons il y avait un document qui déplié, devait faire deux mètres sur un et sur lequel se trouvait des marques. Il le déplia et l’étala sur la planche posée sur les tréteaux, on aurait dit qu’elle avait été construite exprès pour supporter ce document. Lorsqu’il vit les hachures il comprit que cela correspondait aux rails qu’il avait vu, cela devait être le plan du petit village. A ce moment-là il entendit sa tante rentrer, il se dit qu’il se mettrait à la reconstruction de la maquette dans l’après-midi. Il reprit le document et le posa sur l’établi, il referma la porte derrière lui et descendit rejoindre sa tante.

Après avoir déjeuné avec sa tante ils parlèrent un peu du passé, elle lui parla des jeunes de son âge avec lesquels il jouait, mais bien peu étaient restés au village. Il lui parla de sa femme, de ses enfants, de son travail, puis il l’aida à faire la vaisselle, malgré ses protestations.
- Puisque tu es là, je vais en profiter pour aller voir une amie qui est un peu fatiguée en ce moment, je reviendrais vers les dix-huit heures.
- C’est bon, ne t’inquiètes pas, je vais aller encore fouiner un peu au grenier.
Sa tante partie, il remonta au grenier. Il punaisa le document sur l’établi qui comme il le supposait avait été construit pour ce faire, il disposa l’établi au centre de la pièce pour pouvoir en faire le tour et entreprit de mettre en place la maquette dessus.
Le plan était un grand rectangle délimité par un gros très noir qui représentait les limites, et qui à intervalles réguliers était entrecoupé par un gros point noir. De part et d’autre de la voie ferrée qui pénétrait dans ce rectangle et qui le traversait d’un bout à l’autre, se trouvait des hachures noires représentant sans doute les bâtiments d’entrée.
Hors du grand carré il y avait un emplacement de couleur rouge avec l’indication de quatre ou cinq constructions. A l’intérieur du grand rectangle et à sa gauche se trouvait un emplacement de couleur vert olive et la marque de trois bâtiments. En suivant la voie ferrée et de part et d’autre de celle-ci, le plan était divisé en divers espaces de différentes couleurs. Mais celle qui dominait, était la couleur jaune. Sur cet espace était indiqué les emplacements de ce qui devait être des constructions. A l’extrémité de la voie ferrée se trouvait deux emplacements de couleur noire avec l’indication de deux constructions plus importantes. Avant d’arriver à ces deux emplacements se trouvait un espace de couleur rouge représentant un quart ou un cinquième de la partie jaune avec les mêmes indications pour les bâtiments. Puis d’autres parties bleues, oranges, noires avec l’emplacement des bâtiments. Il ne voyait pas trop ce que cela pouvait représenter, en tout cas, ce n’était pas un village.
Il commença à ouvrir les cartons, tout d’abord il reprit ceux qu’il avait précédemment ouvert et qui contenant les rails et les wagons qu’il plaça sur la ligne dessinée sur le plan. Il continuait d’ouvrir les cartons qui contenaient les petites constructions avec les couleurs correspondants à celles du plan. Le dernier carton ouvert contenait les maquettes des constructions allant sur les emplacements de couleur noire, il y avait là, les deux constructions se trouvant à l’extrémité de la voie ferrée, les deux se trouvant dans le coin droit du plan qui étaient surmontées de deux grandes cheminées. Et enfin une vingtaine de petites tours correspondant aux différents points noirs portés sur la ligne de délimitation du plan.
En prenant du recul il s’aperçut qu’il était en présence d’un camp, de quoi s’agissait-il?
Il prit en main le bâtiment de l’entrée du camp dont la hauteur laissait passer le train, il put lire l’inscription qui le glaça d’effroi « ARBEIT MACHT FREI » « le travail rend libre ».
Il était en présence de la maquette du camp d’Auschwitz ! Il se souvint alors de l’émission, où on indiquait les bâtiments où étaient entreposés tout ce qui avait été pris aux déportés, des pièces pleines de valises, de lunettes, des montagnes de vêtements, de cheveux, il comprit d’où venaient les costumes de son oncle et de son père. Alors, en pleurant il remit la maquette dans les divers cartons, replia le plan et descendit le tout dans un coin du jardin, l’absence de sa tante l’arrangea grandement.
Il retourna dans la maison, prit la photo se trouvant sur la cheminée, et alla la mettre avec l’ensemble des cartons, puis y mit le feu.
Il partit le lendemain sans se retourner.
DIVERDE 2022

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 » la photo DIVERDE 1/3/2023 16:08
     Re: la photo Sybilla 4/3/2023 23:18
     Re: la photo RomanNovel 7/3/2023 21:07
     Re: la photo Chibani 9/3/2023 11:34

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