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     Wiener Polizei : "La nouvelle coéquipière"
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Expéditeur Conversation
Mr_Guyguy
Envoyé le :  26/12/2024 15:05
Plume d'or
Inscrit le: 9/6/2009
De: Rouen, Mornes des esses et Casablanca
Wiener Polizei : "La nouvelle coéquipière"
Je me regarde dans le miroir du vestiaire. Un grand type, légèrement enveloppé, un peu de moustache sous le nez. Je porte un costume gris, bien taillé, mais déjà un peu trop large pour mon goût. Un homme de mon âge, qui a passé dix ans à la police, ne doit plus porter ces habits trop serrés de l’adolescence. Non, moi, je suis un peu plus imposant, avec des épaules solides et un ventre qui ne ment pas. Mais j’ai mes atouts. Quand je fais une blague, les gens rient. Pas toujours de la meilleure façon, mais ils rient. Et ça me va.

Aujourd’hui, c’est un jour particulier. J’ai une nouvelle coéquipière. Miss Fritzlar. Gerhardt von Königsbergen, notre supérieur, m’a appelé ce matin pour me prévenir de son arrivée. Je devais l'attendre dans mon bureau. Sauf qu’elle est en retard, comme beaucoup de jeunes qui croient que le temps peut attendre.

J’entends des pas précipités dans le couloir, puis la porte s'ouvre. Une jeune femme, tout juste sortie de l'école de police. Miss Sarah Fritzlar.

Elle est… différente. Petite, pâle, presque translucide. Elle a cette allure d’intello, comme un livre qu’on pourrait ouvrir en plein milieu de la rue et qui nous dirait tout de suite ce que nous devons savoir. Elle porte des lunettes rondes, petites, qui semblent coller à son visage pâle. Ses cheveux sont coupés courts, comme si elle avait voulu rendre son apparence aussi pratique que possible. Pas de jupe ou de robe comme les autres jeunes femmes dans la rue, non. Elle porte des pantalons, ce qui, au début, me choque. Nous sommes en 1953, après tout. Les femmes ne portent pas de pantalons, ou du moins, pas dans la police.

« Miss Fritzlar », dis-je en tendant la main avec un sourire poli mais formel. « Je suis désolé, mais vous êtes… légèrement en retard. »

Elle me serre la main, un peu nerveuse. « Je suis vraiment désolée, Monsieur Schwarzmann. J’ai eu un contretemps. »

Je la dévisage un instant, avant de prendre un air plus décontracté, histoire de briser un peu la glace. « Ce n’est pas grave. On va devoir faire avec. Vous êtes prête à travailler, Miss Fritzlar? »

Elle hoche la tête, mais ne dit rien de plus. Il y a un moment de silence gênant, jusqu’à ce que je brise à nouveau la glace. « Gerhardt von Königsbergen vous a donc envoyée, j’imagine ? C’est lui qui a décidé qu’on travaillerait ensemble. Il me l’a dit ce matin. »

« Oui, Monsieur », répond-elle simplement.

Son ton est froid. Pas étonnant. Il faut un certain temps pour comprendre ce métier, et je peux deviner qu’elle est du genre à vouloir tout faire parfaitement. Moi, ça ne m’intéresse pas de jouer à ce jeu. J’ai trop de bouteille pour ça.

« Bon, allons-y », dis-je en me levant. « On a une affaire à régler. »

Je me dirige vers la porte, et elle me suit de près. Pas un mot. Je me tourne brièvement vers elle. « Miss Fritzlar, vous avez eu l'occasion de faire connaissance de la ville, ou vous êtes encore un peu perdue dans le dédale de Vienne? »

« Je connais la ville, Monsieur », répond-elle, un peu plus calme maintenant. « J’ai pris le temps de m’installer avant de commencer. »

« Bien, bien », je réponds d’un ton plus détendu. « C’est important de connaître son environnement. Même pour une enquête. La ville est comme un piège parfois. Mais vous le découvrirez bientôt. »

La voiture qui nous attend nous emmène rapidement vers la villa où nous devons enquêter. Une fois à l’intérieur, je commence à essayer d’engager une conversation pour mieux comprendre cette coéquipière étrange. « Vous avez choisi la police, donc vous aimez résoudre des énigmes, non? »

Elle me regarde, un instant perplexe, puis répond d’une voix calme, presque monotone : « Oui. C’est ce qui m’intéresse. Chercher des réponses là où les gens ne voient que des questions. »

Je souris doucement, mais je ne la laisse pas me déstabiliser. « Intéressant. Pas mal pour quelqu’un qui porte des pantalons dans une époque qui préfère les jupes, hein? »

Elle ne réagit pas. Juste un léger haussement de sourcils. Elle est froide, mais en même temps, déterminée. Ce qui, pour être honnête, m’agace un peu.

« Je vois que vous êtes de la vieille école, » continue-t-elle, en me dévisageant de ses petites lunettes rondes. « Peut-être que vous n’aimez pas changer les règles, Monsieur Schwarzmann. »

« Les règles? » je répète, haussant les épaules. « Les règles, c’est ce que l’on suit quand on ne sait pas comment réagir autrement. Mais ici, il faudra bien plus qu’une règle pour résoudre ce genre de crime. »


Nous arrivons rapidement sur les lieux du crime, une petite résidence cossue au centre de Vienne. Mila Ibrahimova vivait ici, entourée de luxe, mais aujourd’hui, c’est dans cette même maison qu’elle gît, morte. La scène du crime, en tout cas, ne me laisse aucun doute : ce n’est pas un accident.

La porte de l'appartement est entrouverte. J’échange un regard avec Miss Fritzlar avant de la pousser doucement. À l’intérieur, l’air est lourd, presque étouffant, comme si l’âme de la jeune chanteuse s’était accrochée à ces murs. Le corps est étendu près de la fenêtre, et une odeur de parfum envahit l’espace. Je me penche sur la victime.

« Elle a dû se débattre », dit Miss Fritzlar d’une voix basse. « Regardez ses mains. »

Je me redresse et la fixe un instant. Miss Fritzlar, bien que timide et réservée, semble déjà dans son élément. Je n’arrive pas à m’empêcher de la comparer à Carlotta, ma femme. Elle n'était pas comme Miss Fritzlar, non. Carlotta était grande, bien plus que cette jeune fille qui me fixe de ses yeux perçants, et elle ne portait jamais de pantalons. Elle s’habillait avec classe, se mouvait dans la pièce avec cette élégance qui me rendait fou. Mais, dans sa quête de perfection, elle devenait de plus en plus insupportable, et petit à petit, elle me détestait. Ce qui m’effrayait le plus, c’était qu’une partie de moi commençait à comprendre pourquoi.

« Alors, vous pensez que c’est le manager, Ulrich Gottlieb? » demande Miss Fritzlar, me tirant de mes pensées. Elle est toujours là, prête à avancer, à poser les bonnes questions. J’ai presque l’impression qu’elle me pousse à me concentrer, à être meilleur, comme Carlotta aurait voulu que je sois.

Je souffle, agacé par cette comparaison involontaire. « Gottlieb a un mobile, c’est certain, mais ça ne colle pas. On verra bien. Il faut enquêter plus profondément. »

Je me lève pour observer la pièce. Miss Fritzlar me suit de près, comme si elle essayait de capter chaque détail. D’un coup, une pensée me traverse l’esprit : ‘Elle est bien trop concentrée’. Si ça se trouve, elle ne voit même pas la vraie image du crime, juste les petits éléments qui la confortent dans ses hypothèses. Cela me rappelle Carlotta, qui, même après tout ce temps, analysait tout autour d'elle avec une précision qui la rendait insupportable.

"Et vous, qu’est-ce que vous en pensez ?" lui demande Miss Fritzlar, sortant soudainement de son mutisme.

Je la fixe. Le temps semble se suspendre. Elle semble vouloir tester ma patience. Alors je lâche un petit sourire. « Je pense que vous avez raison de chercher plus loin. Ulrich est trop évident. Mais il y a quelque chose qui cloche. Pourquoi quelqu’un tuerait-il sa propre fille pour une simple dispute ? »

Miss Fritzlar hoche la tête. « Mais vous ne trouvez pas que la situation entre la victime et sa mère est étrange ? Elle semblait en très bons termes avec son manager, mais moins avec sa mère. »

‘Sa mère…’ Je repense à Carlotta. Elle aussi, parfois, me disait des mots pleins de colère, puis, soudainement, elle se mettait à pleurer, en me disant qu’elle ne voulait pas que je parte, que je la laisse. Mais moi, j’étais fatigué de ses caprices. Peut-être que Miss Fritzlar et moi, nous nous ressemblons plus que je ne le pensais. Elle, qui semble presque aussi détachée de ses émotions, et moi, qui en ai trop. Le conflit que j’ai avec Carlotta me ronge encore, mais je n’en parle jamais. Et je n’ai pas l’intention de le faire ici, avec cette jeune fille qui essaie de comprendre mon métier, sans en savoir encore grand-chose.

Je regarde Miss Fritzlar. Elle est toujours là, en train de fouiller autour du corps. Une idée germe dans ma tête. « Regardez bien ce bracelet qu’elle porte à son poignet », je dis, en pointant du doigt l’objet en argent qui brille sous la lumière tamisée de la pièce.

Miss Fritzlar s’avance, scrutant le bracelet. « C’est un bijou précieux. Peut-être un cadeau. »

« Un cadeau, mais pas de son manager », réponds-je, en me tournant vers elle. « C’est de la part de sa mère. Je le sens. Un cadeau qu’on fait à quelqu’un qu’on aime beaucoup… ou qu’on déteste encore plus. »

Je la laisse digérer l’information. La colère commence à monter en moi. Ce genre de meurtre me rappelle les disputes violentes que j’ai eues avec Carlotta, les moments où les mots devenaient des armes. Mais cette fois-ci, je ne peux pas être faible. Je dois prendre les choses en main.


La route vers la villa Ibrahimova est sinueuse, bordée de haies denses, de maisons abandonnées et de champs de blé à perte de vue. Miss Fritzlar et moi avons échangé peu de mots depuis notre départ, chacun absorbé dans ses pensées. Je me surprends parfois à jeter un coup d’œil furtif vers elle. Elle semble totalement concentrée, les yeux fixés droit devant, mais une part de moi se demande si elle pense à la même chose que moi. Est-ce que cette enquête lui rappelle déjà pourquoi elle a choisi cette voie ? Peut-être.

Je me souviens soudainement de ma propre famille, de Carlotta. L’image de ma femme, avec ses cheveux noirs légèrement ondulés, son regard doux mais déterminé, envahit mon esprit. J’avais un instant oublié l’odeur du pain fraîchement cuit qui embaumait la cuisine chaque matin, ou la chaleur de ses bras autour de Karl, notre petit garçon de cinq ans. Elle faisait tout pour que la maison soit un endroit paisible, même après une journée longue et difficile comme la mienne. Le contraste entre Carlotta et Miss Fritzlar est frappant. Carlotta, toujours prête à prendre soin de moi, à me rappeler qu’il est important de prendre une pause, de manger un bon repas, de profiter des moments simples. Son visage, pourtant marqué par les années, reste toujours un havre de douceur.

« Vous semblez pensif, Monsieur Schwarzmann, » dit Miss Fritzlar soudainement, brisant mes réflexions. « Avez-vous une théorie sur le meurtre de Mila Ibrahimova? »

Je secoue la tête, essayant de revenir à l’enquête. « Pas encore, Miss Fritzlar, mais j’ai quelques idées. Le manager, Gottlieb, semble un peu trop calme, mais il y a aussi la mère, Charlotte. Elle pourrait bien être l’élément clé. En tout cas, cette villa ne me plaît pas. Trop de secrets. »

Elle ne réagit pas immédiatement, se contentant de hocher la tête. Elle doit penser que je suis un vieux flic trop attaché à son intuition, mais elle n’a pas tort, cette intuition me sert parfois mieux que toute logique froide et dénuée de sentiments. L’intuition, c’est la clé. Et maintenant, il faut que je garde en tête chaque détail, chaque geste. La vérité est souvent dans les non-dits.


Lorsque nous arrivons enfin devant la villa, un vieux manoir imposant qui semble tout droit sorti d’un roman gothique, une légère brise agite les rideaux des fenêtres, comme si la maison elle-même essayait de cacher des secrets. Charlotte Ibrahimova se trouve à l’intérieur. Miss Fritzlar prend l'initiative de frapper à la porte, mais je m'assure de rester à l'arrière, observant. Je n'aime pas trop les premières impressions, et je préfère laisser les autres faire le premier pas.

Lorsque Charlotte Ibrahimova nous accueille, c’est une femme plus âgée, au visage dur, marqué par des années de lutte, qui apparaît. Sa silhouette élancée porte un manteau de fourrure, comme pour cacher la fragilité de son corps. Elle semble bien moins affectée par la mort de sa fille qu’elle ne le devrait. Son regard est froid, impassible, comme si elle attendait que quelque chose de terrible se produise.

"Madame Ibrahimova," commence Miss Fritzlar, "nous enquêtons sur la mort de votre fille, Mila. Nous aimerions vous poser quelques questions."

Charlotte nous invite à entrer, mais l’air dans la villa est lourd, oppressant. L’odeur de poussière mélangée à celle des fleurs coupées donne à l’endroit une sensation de stase. Les meubles sont élégants, mais le décor semble un peu délavé, comme si le temps avait oublié ce lieu.

Miss Fritzlar commence son interrogatoire de manière formelle, mais moi, je garde un œil sur chaque mouvement de Charlotte. Ses mains tremblent légèrement lorsqu’elle nous sert des boissons, mais c’est tout. Rien d’autre ne trahit ses émotions. Elle semble jouer un rôle. Une femme blessée, mais qui ne veut pas montrer sa douleur.

« Vous êtes la dernière personne à avoir vu votre fille vivante. Pouvez-vous nous dire ce qui s’est passé le soir de sa mort ? » demande Miss Fritzlar, son ton professionnel et ferme.

Charlotte fixe le sol un instant, comme si elle cherchait ses mots. « Mila... Elle était une artiste. Elle ne comprenait pas. Elle voulait tout, mais elle ne savait pas ce qu’elle voulait vraiment. Nous avons eu une discussion, rien de plus. Elle avait ses rêves. Mais je ne l'ai pas tuée, si c'est ce que vous insinuez. »

Je la regarde fixement. Quelque chose dans son regard a changé, mais c’est trop subtil pour que ce soit facile à décrire. Un éclat furtif, quelque chose qui m’échappe. Elle cache quelque chose. Je le sens au fond de moi. « Rien de plus ? » dis-je finalement, brisant le silence. « Vous avez eu une discussion, vous dites. Et cette discussion ne portait pas sur votre fille, ni sur ce que vous ressentiez à son sujet ? »

Elle me regarde droit dans les yeux. « Non, » répond-elle sèchement. « Elle voulait partir. Elle voulait quitter la maison, son manager. Et moi, je ne pouvais pas l’accepter. Elle ne comprenait pas. »

Je la fixe un moment de plus avant de répondre. « Nous allons devoir vous demander de nous accompagner au poste. Il semble qu'il y ait des éléments que vous n'avez pas encore partagés. »

Miss Fritzlar prend la parole à son tour. « Nous allons prendre votre déclaration. Si vous êtes innocente, alors il n’y a aucune raison de refuser. »

À ce moment précis, mon esprit dérive encore. Charlotte me rappelle Carlotta dans une certaine mesure. Non pas dans son attitude froide, mais dans cette impression qu’il y a toujours plus derrière les mots qu’elle prononce. Carlotta, parfois, me donnait l’impression de me cacher des choses. Elle savait si bien se comporter, comme une actrice dans une pièce de théâtre. Mais c’est aussi ce qui faisait d’elle une femme admirable. Elle savait comment garder le contrôle, même dans les moments difficiles. ‘Et Karl’, je pense à notre fils, sa petite main tenant la mienne quand je rentrais à la maison après une longue journée.

Ce soir-là, en rentrant chez moi, Carlotta m’attendait dans la cuisine, un plat fumant de schnitzels sur la table. Elle sourit, me demandant comment la journée s’était passée. Il n'y a rien de plus réconfortant que ces petites attentions, ces gestes simples. Elle était la lumière de ma maison, même dans l’obscurité de mes pensées. Et Karl, toujours aussi joyeux, me montre fièrement son dessin de la journée. Un simple croquis de son père. C’est ça, la vie.

Mais la villa Ibrahimova et l’enquête sont loin de tout ça. « La vérité n’est jamais aussi simple. »
Sybilla
Envoyé le :  28/12/2024 3:07
Modératrice
Inscrit le: 27/5/2014
De:
Re: Wiener Polizei : "La nouvelle coéquipière"
Bonsoir Cher Ami poète Mr_guyguy,

Superbe enquête et roman policier !

J'ai hâte de connaitre la suite !

Passe de Joyeuses fêtes !



Belle soirée Cher Ami poète Mr_guyguy !
Toutes mes amitiés
Sybilla


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Presque toutes mes poésies ont été publiées en France et ailleurs avec les dates ""réelles"" de parution.

Le rêve est le poumon de ma vie (Citation de Sybilla)

Mr_Guyguy
Envoyé le :  3/1/2025 1:13
Plume d'or
Inscrit le: 9/6/2009
De: Rouen, Mornes des esses et Casablanca
Re: Wiener Polizei : "La nouvelle coéquipière"
Mes salutations Sybilla,

Merci pour ton commentaire, il y a d'autres histoires en cours pour la police Viennoise.

Tu pourras lire la suite bientôt !

Merci, à toi aussi.

Amitiés.
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