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     Les Clétupes (Fiction)
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Expéditeur Conversation
Palmier
Envoyé le :  9/12/2021 10:32
Plume de platine
Inscrit le: 12/12/2005
De: Cévennes (France)
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Les Clétupes (Fiction)
"Les soucoupes volantes viennent-elles nous espionner"
(Les Journaux)



LES CLÉTUPES




Il y avait des années et des lustres qu’on n’avait plus entendu parler des soucoupes volantes, et les hommes les avaient oubliées. Ce qui les intéressait beaucoup plus à l’aube de ce XXI° Siècle était les clétupes. Les clétupes étaient belles, mais l’humanité les regardait avec un certain malaise. On parlait de mutation, d’unification des espèces, et tout cela n’était guère réjouissant.
Cela avait commencé en France, un beau matin d’Avril. Pierre Quefec avait l’habitude de se lever tôt pour aller travailler aux champs. Les vaches avaient passé la nuit au pré, au milieu de l’herbage où fleurissaient déjà les pâquerettes. Le printemps arrivait en avance cette année-là en Normandie.
Pierre n’eut pas besoin de beaucoup de clarté pour voir sa première clétupe. La Noire avait le mufle dessus. Elle ruminait avec méfiance. Plus loin, une autre surgit du pré. En dix minutes, sous les yeux de Pierre stupéfait, le sol se couvrit de clétupes. Il n’avait encore jamais vu ce genre de fleurs et il n’était pas le seul, à vrai dire, comme la suite le prouva amplement.
La clétupe avait une tige ligneuse comme la clématite et le sommet de la corolle évasé comme le haut-parleur d’un phonographe ancestral. L’ensemble tige-corolle mesurait bien vingt centimètres de hauteur. Les tiges ne portaient aucune feuille. Les corolles, chose curieuse, étaient totalement rigides, mais souples et transparentes à la fois. Elles ne présentaient pas de pétale, et pouvaient atteindre quinze bons centimètres de diamètre. Les clétupes pouvaient varier leurs couleurs à l’infini.
Pierre se baissa alors pour en cueillir une. Cela lui fut assez difficile, car la tige tenait solidement au sol et il dut, pour l’arracher, détacher une grosse motte. Les racines noueuses et profondes faisaient penser a celles de la gentiane.
Bien sûr, dès que Pierre colporta la nouvelle, preuve en main, les gens ouvrirent des yeux stupéfaits et coururent contempler les champs. Les botanistes amateurs de la région se précipitèrent sur le terrain. Le journal local, puis régional, enfin la télévision s’en mêlèrent. Le soir même, une équipe de reporters, de photographes, de cameramen était sur les lieux. Les clétupes furent télévisées, photographiées sur toutes les faces et tous les angles. On en arracha des brassées....
Elles n’avaient aucune odeur.
Quelques jours plus tard les événements se précipitaient. On signalait l’éclosion de clétupes partout, dans le Sud-ouest, puis le Centre... Enfin la France entière fut couverte de clétupes. A leur tour, les pays étrangers furent envahis. Les télévisions, les journaux étrangers rentrèrent en transes. Il ne fut question que des clétupes. En quelques jours la steppe comme la savane, les oasis du désert, les plaines d’Amérique du Nord furent envahies. On en signala même en Amazonie ! En quinze jours la terre fut couverte de clétupes....
Entre temps l’opinion publique s’était émue.
On avait d’abord trouvé cela amusant. Le bouquet de clétupes, même s’il coûtait quelque peine a cueillir, était fort décoratif. La longévité de la fleur coupée était extraordinaire. Cependant, l’invasion généralisée de ces fleurs inquiétait tout de même les gens.
La première chose qui les rassura un peu fut que le bétail semblait trouver les clétupes à son goût. Les vaches, chèvres, moutons, en broutaient continuellement sans aucun dommage. Malgré tout, il fut décidé en haut lieu de réunir un Congrès International de Biologistes et de Botanistes pour confronter les opinions.
Le Congrès dura cinq ans et il n’en sortit que des banalités, des faits que tout le monde connaissait. D’abord, on vérifia la remarquable résistance de ces fleurs. Coupées, placées dans un vase d’eau même croupie, elles se conservaient indéfiniment. On pouvait même les replanter ! Par contre, coupées, hors d’un vase d’eau, elles séchaient en vingt minutes et devenaient poussière grise en une demi-heure. Ceci ne facilita pas le travail d’analyse en laboratoire. Dans ces conditions les études microscopiques restèrent sommaires. Pour autant qu’on put en juger, le tissu cellulaire de la plante était quasi semblable à celui de végétaux connus et normaux.
On s'aperçut ensuite que la fleur résistait à tous les herbicides, fongicides connus. De plus, le feu provoquait son éclatement très violent. En voulant faire brûler un champ de clétupes, un corps de pompiers faillit provoquer un petit séisme. On renonça donc à s’en débarrasser de cette façon.
Enfin, comme pour achever leur conquête, les clétupes peuplèrent les jardins des villes. C’est là qu’on put les observer régulièrement. Elles naissaient en une nuit d’une sorte de mycélium, vivaient quelques semaines sans changer, puis sans transition, leur coeur grossissait rapidement jusqu’à atteindre la taille et la couleur d’un oeuf de pigeon. La fleur paraissait arrivée à maturité.
Si on les arrachait, les clétupes repoussaient rapidement, mais, et l’on fit cette curieuse constatation dans un jardin urbain, toujours en nombre égal.
Les experts conclurent : Premièrement, qu’il était pour l’heure impossible de se débarrasser des clétupes. Deuxièmement, qu’elles n’étaient pas nuisibles ni aux hommes, ni aux animaux. Troisièmement, que le nombre des fleurs était à peu près constant dans le monde...
Les saisons passèrent. L’été succéda au printemps, puis vint l’automne, puis l’hiver. Les clétupes ne bougèrent pas des champs. Leurs corolles émergeaient de dix centimètres de neige. On dut s’en accommoder.. puis on les oublia. Enfin un savant leur donna un nom scientifique: Clematita Tulipea Gigantea. Nom vulgaire : clétupe, contraction de Clématite et de Tulipe.
Après quoi on les classa, seules dans leur genre, au fond des Traités de Botanique. Comme on avait nommé la fleur, elle inquiéta beaucoup moins. On finit par la considérer comme un élément naturel du paysage
Cela dura dix ans. Puis, une nuit d‘été, les clétupes moururent. Toutes. Et leur mort fut encore plus rapide que leur naissance.... Et ce ne fut pas un phénomène ordinaire.
Quand les matineux ouvrirent leurs fenêtres, il leur sembla qu’il neigeait. L’horizon était floconneux et grisâtre. Le soleil perçait à peine le voile blanc. Quelques chanceux purent voir mourir les dernières clétupes et s’expliquer ainsi le phénomène : la plante séchait d’un seul coup et le coeur rond et blanc, éclatait en flocons légers qui s’envolaient au vent !
L’atmosphère terrestre était duveteuse. Au demeurant, c’était très désagréable de respirer… Les gens, ahuris, béaient derrière leurs fenêtres. On s’était claquemuré pour échapper aux flocons, et pourtant quelques-uns passaient par des fissures mal calfeutrées. Au grand soulagement des malheureux claustrés, les flocons disparurent dans la journée. Atteinte de folie ascensionnelle, la masse floconneuse s’éleva dans le ciel tout le jour. Le soir même elle s’agglutina en gros nuages. Les gens, surgis dans les rues, contemplaient le ciel, la tête renversée. Des flocons retardataires grimpaient, pressés, à la poursuite des autres.
Ils s’étaient groupés en gros cumulus blancs et filaient vers l’espace. Il fallut les poursuivre en avion dans les jours suivants... mais ils continuaient à s’éloigner, défiant les Lois de la Pesanteur et de l’attraction terrestre… Au bout de quelques semaines, on ne les vit plus qu’au télescope. Puis enfin ils disparurent dans l’immensité du vide...
Les experts, choqués de cette évasion anti-scientifique, parlèrent de "mutations éphémères", d'"espèces vagabondes", de "dégénérescence du sol". Le fatras et le galimatias scientifique prouva, s’il en était besoin, que nul n’y comprenait rien.
Et les Hommes reprirent leurs occupations quotidiennes, leurs luttes intestines et fratricides, leurs politiques stériles. Car telle est notre vanité que nous oublions vite ce que nous ne comprenons pas. Les clétupes avaient disparu. On les raya des manuels de botanique en les classant parmi les plantes fossiles. Et tout fut dit.
Cependant, loin dans l'espace, aux confins des lointaines nébuleuses, les flocons blancs s’étaient arrêtés. Si les Hommes avaient été moins éloignés, ils auraient entendu dans leurs appareils de radio un énorme sifflement.
Les flocons se déchargeaient de leur énergie avec une puissance extraordinaire. Ils se vidaient petit à petit de toutes les informations accumulées depuis des années, et ils les transmettaient ailleurs. Cela dura des heures, et puis, vides de toute substance, les flocons se dispersèrent lentement parmi les étoiles. Leur mission achevée, vides parmi le Vide, ils retournaient au néant. Si les Hommes avaient été là, ils auraient peut-être compris. Peut-être.....
Le flot d'énergie suivit une route rectiligne, dans l’immensité infinie de l’Univers. Il traversa des nébuleuses et côtoya des milliers d’étoiles… Il poursuivit son chemin si loin que les distances n’avaient plus de signification, au delà de tout entendement humain. Puis vint le but : une planète verte et bleue, blottie près d’une étoile rougeoyante.
Le signal s'engouffra enfin dans un énorme pavillon dressé sur un long piédestal tubulaire : on eut dit une géante clétupe ! Et les deux Etres qui veillaient là contemplèrent longuement leurs cadrans de contrôle. Leurs pensées étaient identiques : il faudrait continuer longtemps encore à surveiller cette Humanité sauvage et sanguinaire qui avait l’inconscience de se nommer elle-même HOMO SAPIENS.
HOMME SAGE ! ! SAGE ! ?
Mais on avait le temps. Cependant, la prochaine fois, il faudrait trouver autre chose....




Extrait d'un recueil de nouvelles de SF







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Avec mes amitiés

Alain

Pour voir mon site : Mes vers à moi

""- Ah ! Monsieur ! Que seraient les hommes sans les femmes ?
- Ah ! Madame ! Ils seraient rares ! Très rares !""
(Mark Twain)

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 » Les Clétupes (Fiction) Palmier 9/12/2021 10:32
     Re: Les Clétupes (Fiction) dolores 9/12/2021 14:24
     Re: Les Clétupes (Fiction) Sybilla 9/12/2021 17:51
       Re: Les Clétupes (Fiction) Palmier 11/12/2021 17:51
         Re: Les Clétupes (Fiction) StJust 30/1/2022 6:54
           Re: Les Clétupes (Fiction) Palmier 30/1/2022 7:16

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