Plume de platine Inscrit le: 23/4/2013 De: |
Au seuil du portillon
Le portillon était ouvert, un portillon élimé par le temps, gracié du monde en un reflet lointain. Il entre. L'air s'arrête, se crispe, se décline. Un soupir dense, un soupir lourd. Est-ce possible? Il avance Les feuilles rougeâtres s'amoncellent sur la terre, seul délicatement achoppait l'écho de mes pas. Il avance Au détour d'un raidillon, s'éveille le mystère, une feuille de marronier bouge sans le moindre souffle, le sentier semble près de tituber, dans le vide au coeur de la griffe épineuse. Il avance Dans tout ce chaos, ses rêves s'éraillentt aux fragons sauvages, dont les graines sont une tache de sang Quelques chagrins s'ennuient Confus et fluides dans les futaies. Il avance Une promesse sensible, endolorie se balance , à la cadence de ses pas. Une cabane reniée depuis si longtemps gît étripée, une masure élaguée de tant d'absence! Il effleure du bout des doigts l'orle du bois, pour y décrypter le souvenir sous le soleil d'hier. Le silence y flâne, en silence, son chant les harcèle, frisson Soudain, au loin, un oisillon essaie de battre des ailes-son cri dans le sous-bois où l'ombre s'enlise. Pas une Aria ne suit. Il avance égoïste du temps. Le moment seul l'enlace. Une peine ose la rencontre et s'évade . . Chaque détour du sentier offre sur le souvenir son appel toujours précédent celui qui avance. Soudain entre les rameaux, un petit filet d'eau fraiche. Soudain une éclosion. Elle érafle les feuilles, la terre les bosquets austères et la caresse du buxus odorant... Son murmure fend le silence, nul mensonge s'éloigne.ni éraille. Nulle tromperie non plus de soi contre soi Il avance
Il se hisse, doucement, au dessus des pâtures, il épouse la cime des hêtres, vole entre les branches. Il vole, impassible, habité d'une aura, tranquille, d'une joie toujours à venir. Ambulations fiévreuses dans les méandres des songes. Tout s'abroge. Elle là -bas y compris Qui a disparu. Il avance . .Il se réveille, dans une prairie assourdie, s'éffare vaguement de ce qui l'entoure: la couleur du ciel, les oiseaux éparpillés, les fourmis qui lui montent sur ses jambes..le temps s'écoule, placide. Immobile, il accueille le silence, respire le calme. Quelques débris de souvenirs sans allégeance, une souffrance déchirée sitôt apparue, disparue. Un trouble infime. Le tournis des rafiots qui se dandinent, dans le flamboyant clapotis du quai, à l'heure où la rade dort encore. L'hymne berce son front  _La féerie de son rythme, dans l'unique musique de son souvenir!
L'hymne le quitte, il s'endormirait presque, si ce n'était cette halètement entêté. Il ne serait donc pas mort? Le calme est là , une douceur sur son visage s'est mise à s'offrir, il s'y laisse prendre, s'y laisse l'accueillir. Elle lui susurre à l'oreille, la quiétude du moment.
Dans les airs, passe élégamment cendre grise, fragile, ardente où encore s'inscrit l'écho qui l'appelle L'écho prêt à se fondre, dans le bleu éthéré du ciel.
Les champs de blé flottent et se craquent dans le vent, les pierres roulent  Sous ses pas, dans les chênes Kermes, la fragrance de l'air susurre le cours d'eau, ample, s'ésquive entre les massettes.
   Il avance Les pierres roulent sous ses pas, la peine et la joie se mêlent, La gaité parfois si forte, si câline, si fortement câline, blessé, touche, peut faire mal sans même savoir pourquoi.
Elle siffle, chante, crie en lui, s'attise, l'égratigne. Il se remémore, un moment de bonheur, mais un bonheur évité, un bonheur sans raison, il le transperce.
La peine d'un bonheur vrai. L'ample calme de la rivière, entre les massettes au son de verre, une estampillé de ronces en plein coeur. Les fruitiers embaument de senteurs. Les abeilles s'y activent, perles de soleil qui valent, dans le calme dense.
   Il avance Les pierres roulent sous ses pas, une coquille de noix vide, à l'ombre d'un peuplier se berce.                   Les ambulations fiévreuses dans les méandres des songes
Où etait-ce? Dans quelle vie, perdue?
Il avance.
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