Un chant céleste...
Les doigts s’enfiévrèrent déjà sur les instruments,
la foule docile se taisait peu à peu,
lors, la femme levait déjà sa baguette de jeu,
les mots s'élevaient vers les cintres un instant.
La diva fit alors entendre sa plainte,
jugulant les cordes qui jusque là tremblaient,
tous les vents s'agitèrent pour rivaliser,
la voix du ténor s'éleva, trop vite éteinte.
C'est alors qu'ajoutant une dernière teinte,
la divine soprano reprit de plus belle,
tout disparut, il ne restait qu'un chant rebelle,
triomphant d'un cri plein de fureur et de crainte.
Les anges réveillés firent entendre leur chœur,
l'unisson du ciel et de la terre fut inouï,
Pur instant ou s'ouvrait enfin le paradis,
la diva délivrait le monde avec son cœur.
Les deux amoureux blottis au premier balcon,
croisaient parfois leurs regards tant émerveillés,
conscients peu à peu de l'instant privilégié,
qui apaisait leurs âmes de monde abscons.
Ils lui lancèrent à la fin deux mille baisers,
y ajoutèrent dix-sept bravos éternels,
ce vendredi trois leur semblait tant irréel,
puis, ils s'enfuirent en ce mois de mars un peu frais.
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L'homme est le rêve d'une ombre
(vers 135-140 des Pythiques de Pindare, le prince des poètes).