Sale bĂŞte !
Prés d’un mur éboulé dans les ombres bleuies
Sous un vieil olivier, un vieux tonneau rouillé
OĂą dort un petit chien, dans la paille fraichie
D’un petit jour brumeux, silencieux et prostré.
On l’entendait crier de loin dans la vallée
Durci, le poing tendu devant la basse-cour
Où des poules gisaient sur la terre imbibée :
-« Viendras-tu sale bête, ah , je t’aurai un jour »
Il maugréait encore, entre ses dents serrées
-« Sale bĂŞte, sale bĂŞte, je l’aurai bienÂ
Et toi, sale fainéant, tu l’auras ta raclée !
Tu peux bien te cacher, hors de là , maudit chien »
-« Mais où es-tu, bon sang, sors donc de ce tonneau,
Disait le vieux penché dans sa veste élimée,
Est-ce que tu as bien chaud, gouape de cabot »
Mais il se tut voyant deux yeux d’or qui saignaient.
Te voilà arrangé, dit-il, la voix piteuse,
Il t’aura eu aussi, ce salaud de renard !
En soutenant la tĂŞte entre ses mains noueuses
L’extirpa doucement dans un sombre regard.
-« Vingt ans que je l’avais, il a bien de l’arthrose,
Il est âgé, docteur, mais il peut me servir
Il n’est pas bien vaillant, mais faites quelque chose
Il aime bien chasser, vous pouvez le guérir »
-« Prenez donc un plus jeune et un peu plus fringuant,
La plaie est bien vilaine, je crois que c’est fini
Il est tordu, cassé, et il a fait son temps ! »
Le vieux baissant la tête, lui a dit : « moi aussi »
Doucement, contre lui il a repris sa bĂŞte
Ils ont refait la route en roulant doucement
Doucement l’a posé au chaud dessus la couette
S’est assis contre lui en parlant, doucement.
-« Vois-tu, je ne crois pas que j’ai d’autres brebis,
Je suis bien fatigué, tant pis pour les moutons
Et la chasse, sans toi, je n’en ai guère envie.. »
Les yeux d’or se fermaient lentement disant : « non » !
Monesille
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Cultivez votre amour de la nature, car c'est la seule façon de mieux comprendre l'art! (Vincent Van Gogh)