BLANCHE NEIGE
Il était une fois sept nains courtauds et difformes
qui vivaient retirés du monde dans la forêt.
Leurs semblables parce qu'ils n'étaient pas aux normes,
les accablaient de rires gras et de quolibets.
Blanche-Neige, la fille du roi fut ainsi prénommée,
car ses lèvres rouges et son teint blanc comme flocons
de cheveux noir d'ébène étaient auréolés.
La mort de sa mère fut de sa naissance la rançon.
Son père la pourvut sans tarder d'une marâtre
dont le miroir lucide disait la fuite du temps,
ne voyant d'elle que misère et teint grisâtre
derrière les minauderies d'un corps vieillissant.
« Tu es belle, lui dit-il, mais il vit sous ce toit
bien plus belle que toi, Blanche-Neige, la fille du roi. »
La jalousie, l'humiliation, la colère firent
qu'au chasseur elle ordonna sans délai de l'occire.
Celui-ci, de son accès à l'au-delà ayant souci,
au creux de la forêt profonde l'abandonna.
La jeune fille, errant dans le sous-bois, atteignit
le logis des sept nains, et elle s'y installa.
Le soir venu, ceux-ci, de retour de la mine,
en la voyant crurent atteindre le paradis,
n'ayant de toute leur vie tâté si belle gamine,
et sans façons Blanche-Neige fut recueillie.
« Miroir, suis-je la plus belle ? » dit en son palais la vieille.
Le miroir honnête, manquant de diplomatie,
dans son reflet montra le refuge de la belle,
lui assénant la vérité sans arguties.
La reine, accablée, s'étranglant de fureur,
se munit d'une pomme qu'elle avait empoisonnée,
se déguisa en pauvresse et partit sur l'heure.
A la chaumière des sept nains elle alla frapper.
Blanche-Neige, écoutant son coeur, sans se méfier,
croqua dans la pomme et tomba inanimée.
Un jeune prince qui chassait et venait à passer,
ébloui, la ranima d'un fervent baiser.
La donzelle préfère un seul riche jouvenceau
cela quelle que soit l'époque considérée,
à , fussent-ils sept, de vieux et repoussants nabots
même perdus d'amour, bons et attentionnés !
N.G.