Voyelles.
Poésie célèbre de Arthur Rimbaud.
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"A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes :
A, noir corset velu des mouches éclatantes
Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,
Golfes d'ombre ; E, candeur des vapeurs et des tentes,
Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d'ombelles ;
I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles
Dans la colère ou les ivresses pénitentes ;
U, cycles, vibrements divins des mers virides,
Paix des pâtis semés d'animaux, paix des rides
Que l'alchimie imprime aux grands fronts studieux ;
O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,
Silence traversés des Mondes et des Anges :
- O l'Oméga, rayon violet de Ses Yeux ! "
A. Rimbaud
* Ce sonnet est l'un des poèmes de Rimbaud
qui a suscité le plus de commentaires.
* Certains critiques ont voulu y voir un prolongement de la doctrine baudelairienne des correspondances, et ont élaboré à son propos toute une théorie des phénomènes de l'audition colorée (en effet, Yves Bonnefoy rattache "Voyelles" aux "Correspondances" de Baudelaire, mais pour mieux marquer la différence : Rimbaud est "tout entier dans l'instant du désir violent : exclamatif").
* D'autres, plus aisés à satisfaire, ont cru pouvoir affirmer
que les associations établies par Rimbaud entre chaque voyelle
et une couleur déterminée, avaient simplement pour origine le souvenir des illustrations coloriées d'un Alphabet que le poète
eut probablement l'occasion d'étudier dans son enfance.
* En 1961, M. Robert Faurisson, professeur dans un lycée de province, publia sans nom d'auteur dans la revue Bizarre, numéro spécial, 4ème trimestre 1961, (J.J. Pauvert, éd.), une interprétation du sonnet des Voyelles infléchie dans le sens d'un érotisme systématique. En effet selon M. Faurisson, le sonnet qui nous occupe est "un blason de la Femme, de la Femme vue de haut en bas". M. Faurisson continue ainsi : "Les formes des voyelles suggèrent les "formes" de la Femme. De plus l'évocation se fait "in coïtu", du "point de départ" à l'extase, du commencement à la "pointe" du sonnet, ou pour parler comme Rimbaud, de "A" jusqu'à "O". Si bien que "Voyelles" peut se résumer par le schéma suivant :
* Je crois que seul, lui, le poète, l'alchimiste des mots sait !!!!
Le poète est mystère, la magie opère, les secrets sont gardés.
Arwen.