Plume de soie Inscrit le: 12/10/2012 De: |
Le poète ivre En remerciant Rimbaud de m'avoir prêté son poème Le bateau ivre
Comme je recherchais des rimes impossibles Je me sentis guidé par d’étranges valeurs ! Les muses avaient pris mes pauvres doigts pour cibles Mettant en mon esprit les mots et leurs couleurs.
J’étais pris par les vers venant en équipages Porteurs de leurs desseins refusant les délais. Quand leur délicatesse a glissé sur mes pages, Les poèmes venus me semblaient des palais.
Dans le silence bleu de l’encre des marées Moi, très serein, ouvert tels les cerveaux d’enfants J’écrivis ! Et toutes mes odes démarrées Ont vu des cieux, dans ce fracas, plus triomphants
La tempête a béni les éveils de mes rimes Plus souple qu’un bon cru j’ai dansé sur les mots Qu’ont pu voir des lecteurs qui recherchaient les cimes ; Dis-moi si le bonheur peut apporter des maux ?
Ivre de poésie et de littérature Le verbe pénétra jusqu’au bout de ma main Et les sereines voix qui m’offraient la culture Me donnèrent le cœur à souhaiter demain
Et dès lors, je me suis enivré du poème ; De mon âme venait le quatrain innocent Décuplant mon ivresse en un vertige blême Et heureux, qu’un grisé voit parfois et ressent ;
Où, j’entendais surtout la musique, les lyres Aux rythmes élégants parsemant un amour, Plus profond que la mer, plus fier que les navires Découvrant une terre au premier temps du jour.
Je sais les vers volant ainsi que des colombes Et l’espace, le vent, les cieux : je sais l’espoir, L’aurore permettant que s’entrouvrent les tombes Et j’ai pu quelquefois m’approcher du Savoir.
J’ai pu des astres blancs aux lumières magiques, Interdire l’accès aux alexandrins laids Par l’obligation de n’être pas tragiques, Les vers pour notre cœur n’étant pas des valets.
J’ai pensé des printemps aux heures infinies, Baiser de cette rose aux parfums bienfaiteurs, La composition de rimes attendries, Et le poème noir offrant mille couleurs
J’ai voulu de mes mots apporter les folies Histoire que la foule ait des yeux impulsifs, Sans croire que mes vers se méfiant des lies, Pussent un soir déplaire et devenir fautifs.
J’ai brisé, croyez-le, des rochers très solides Mélangés sans malaise au luxe des châteaux De vers ! Et tant gommés des diamants livides Sous ma plume de sang recherchant les couteaux.
J’ai su tirer les traits sur des vers, pauvres faces Où pourrit toute empreinte et tout le sentiment ! Déchiré le cahier aux sinistres surfaces Et toute poésie oubliant son serment !
Grammaire et vers navrants, rimes tristes, mauvaises ! Échafaudages creux pour de sombres quatrains Où les mots ne pouvaient grimper sur les falaises Chères au Mont Parnasse aux fiers alexandrins !
J’aurais voulu conter au peuple mes tirades, Du diamant prenant les reflets éclatants, Des taches d’encre noire ont sali mes ballades Et de malheureux mots jouaient les importants.
Parfois, ces mots d’orgueil se prenaient pour des faunes, La plaine, d’une larme, immergeait tous ces fous Moqueuse et les tuait comme les amazones Et de l’éternité je voyais les égouts…
Presque mort, poète ivre et sans fleurs naturelles Et les restes d’amour , baisers sans violons. Et j’écrivais, les doigts liés par les ficelles Des idiots ayant l’esprit dans les talons !
Or moi, pauvre rimeur n’ayant pas les cadences, Jeté par la rythmique auprès d’un verre d’eau, Moi dont tous les quatrains niant les évidences N’auraient pas été lus par le moindre crapaud
Libre, buvant, cherchant des rimes sans voilettes, Moi qui ne trouvais pas le sonnet le plus pur Qui donne sa caresse aux excellents poètes Des baisers attendris et des matins d’azur
Qui courais, sali par des rimes aphasiques, Page bête, conduit par d’ineptes espoirs, Quand mes matins transformaient en paraplégiques Les instants savoureux qui se vouaient moins noirs
Moi qui pleurais, voyant mes vers tels des épieux, Le poème s’enfuir vers des esprits plus laids, Filtrant mes géniaux recueils venant des dieux, Je regrette la prose aux mensongers palais.
J’ai lu tant de strophes si belles, des subtiles Dont les vers délicats ignorent la langueur ; - Est-ce en ces quatrains bleus que tu vis et t’exiles, Million de mots d’or, ô ma chère rigueur ?
Mais, lors, j’ai trop écrit de rimes désolantes. Toute phrase est cruelle et tout mot un steamer Las de passer tout près des rives consolantes. Ô que ma plume éclate ! Ô que je sois amer ! Si je souhaite une encre évitant toute tache Nubile et chaude où va le vers si parfumé Un autre doit écrire, un poète moins lâche, Un poème excellent sentant le moi de mai.
Je ne sais plus m’éclairer de vos vers, ô flammes, Embrasser les sonnets comme des mamelons, Ni des alexandrins connaître tous les drames, Ni les composer courts, les écrire trop longs
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