Le Pont des Arts

Nous partîmes pleins de volonté, incertains,
Nous marchâmes dans la poussière et les ténèbres,
Qui rôdaient autour des barrières du destin
De notre amour qui était voué à la lumière.
Liés par le fil noir et fin de la musique,
Nous étions unis dans une harmonie mystique.

Le monde était en suspens, comme nos pensées,
Tandis que nous approchions du vieux pont doré.
Si vieux qu’on aurait cru qu’il avait tout vécu,
Car il porte des amours jamais entendus.
Déambulant entre tant d’histoires inconnues,
Nous cherchions un lieu parfait pour jeter la clef.

Un genou à terre, ayant bien trouvé l’endroit,
Je m’affairais à le fixer avec mes doigts
Rendus imprécis par l’anxiété et le froid.
Soudain, quand mon cœur entendit le petit « clic »,
J’ai senti notre engagement pour notre vie,
Et j’ai su que nous avions posé le bon choix.

Vers mon ange radieux, je me suis levé,
Désirant sceller notre pacte d’un baiser,
Pendant lequel j’ai jeté au loin les deux clefs,
Les envoyant où on ne peut les retrouver,
Dans les tumultes de la Seine où, submergées,
Elles se reposeront pour l’éternité.

La marche reprit, de plus belle, dans le silence
Qui a plus encore de valeur que ces vers.
Nous sommes changés, nous respirons un autre air
Que nous entendons aussi, dans la lumière.
Nous allons, la larme à l’œil, le sourire aux lèvres,
Heureux de ce choix, car on lui donne son sens
Si, à la même chose, en harmonie l’on pense.

Gautier de Moulins