LE COQ, LES POULES ET LE BRACONNIER
La bête suffisance est quelquefois fatale.
La vergogne irait mieux à celui qui l'étale.
Il n'est que d'écouter le vain discours funeste
D'un coq de basse-cour stupide et immodeste :
« Au poulailler voisin on connaît mes mérites,
Et son coq me voyant, sitôt prendra la fuite.
Aussi, sans plus tarder, allons nous incruster. »
Les poules travaillées par la curiosité,
Lui emboîtent le pas, ravalant leur caquet.
Les voici au ruisseau par un pont enjambé.
« Admirez, Mesdames, mon intrépidité,
La belle prestance de mon pas décidé. »
Comme à la parade, pilon nerveux levé,
Il passe hardiment, la plume ébouriffée.
Un braconnier s'adonne à la pêche illégale,
Et voit venir le rôt qu'il mettra dans sa poêle,
D'une main assurée, proprement tord le cou
A ce volatile si conforme à son goût.
« Bah ! Ne regrettons pas » dirent en choeur les poules
« Ce stupide encrêté dont les propos nous soûlent.
Et rentrons au logis. Coq plus jeune et plus beau,
Même s'il est bête, pousse cocorico. »
Et la fermière dont il pinçait le mollet,
Mais l'aurait bien rôti, adopta coquelet.
Le prétentieux borné ne se sait pas stupide,
Dans ses actions d'éclat se croyant intrépide.
Ainsi les tyranneaux, souvent se sentant coqs,
Montés sur leurs ergots dévastent leur époque.
D'autres, pour séduire un beau parterre de dames,
Fats et pathétiques de manœuvres infâmes,
Et bombant le torse s'en allant remplis d'eux,
Souvent ne voient plus loin que le bout de leur queue.
N.G.
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