Cachée sous la futaie,
Perçant à travers la mousse,
Écartant les jeunes pousses,
La source sourdre, gaie.
Des entrailles de la terre
Son eau purifiée
Coule, vive, altière,
Projetée vers sa destinée.
Accouchement secret,
Merveille de la nature
Sur ce berceau de verdure,
Sans témoin indiscret.
Quelques notes claires,
Comme appel désintéressé,
Invitent à se désaltérer,
Ainsi va la source pour complaire.
En toutes les saisons,
Fraîche, câline, rieuse,
Son eau toujours généreuse
S'écoule avec raison.
Si l'âme en peine un jour
T'amène à croiser la route
De cette source, écoute,
Écoute son chant d'amour.
Pour voir l'état de son âme,
Qu'elle soit laide ou belle,
Un cœur penché sur elle
Seul le vrai la source clame.
Le rossignol au chant crépusculaire,
Cet heureux oiseau sans cage,
Au bord de ces trous d'eau claire
Vient y mirer son plumage.
La lune pleine et ronde,
Dans ses heures vagabondes,
Se reflète dans ce miroir.
Autour tout est noir.
Dans la fournaise de l'été,
Lorsque l'air enflamme les blés,
Enfant voit son frais ombrage,
Avec lui reprend courage.
Quand au loin les cloches sonnent,
Quand la prairie au vent frissonne,
La source fait tinter sa voix,
Apaisant la biche aux abois.
Autour mille insectes grouillent,
S'y cache la verte grenouille,
A deux pas un peintre à genoux
Croque l'esquisse de ce bijou.
Sur ses bords foisonnent fougères,
Sphaignes, renoncules, primevères,
L'iris que l'abeille pollinisée
Apprécie sa rive que le trèfle colonise.
Écho à son chant cristallin,
Deux amants, de mots sibyllins,
Abreuvent la source, témoin privilégié,
De serments et baisers échangés.
Oasis de tranquillité,
Homme, animal ou végétal
Y trouve un refuge amical,
Un havre plein d'humilité.
Dieu dans sa mansuétude
A mis dans ce lieu de quiétude
Beaucoup d'amour et du mystère.
Un petit coin d'Éden sur terre.
Ruben.
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Pendant que l'on attend de vivre, la vie passe.
SÉNÈQUE.Ruben