Ils sont toujours assis, seuls, autour de leur canne,
Appuyant leur raison chargée de souvenirs.
Il en est parfois un qui lourdement ricane,
Le cœur déjà rouillé par de trop vieux plaisirs.
Tels des outils usés empilés dans un coin
Ils voudraient essayer de repeindre un sourire,
Mais ils n'ont plus la foi, tout est déjà trop loin,
Le silence est trop fort, il n'est plus rien à dire.
Ils sont anéantis, au fond de leur passé,
Comment leur demander un sursaut d'allégresse,
Leur pauvre vie s'égoutte hors d'un espoir fêlé,
Liquéfiée dans ces ans foulés par leur faiblesse.
Face aux ennuis de vieux, ils chassent à grand peine
Les assauts d'une mort qui estropient leurs jours,
Conscients à chaque instant de la lente gangrène
Grignotant sans répit le soleil des toujours.
Leurs yeux tout ruisselants d'une pâle tristesse
Écoutent cette vie qui continue sans eux,
Laissant parler ces doigts, témoins de leur détresse,
Ne sachant que trembler pour exprimer leurs vœux.
Ils sont fossilisés, condamnés à dépendre,
À ne rien demander, simplement accepter
Et de toute façon que pourraient-ils bien prendre,
Ne retrouvant pas même un objet familier.
Plus rien de ces pastels autrefois dans leur cœur
Qui sauraient adoucir leur fichue pénitence,
A peine le spectacle arraché d'une fleur,
Peut-il encor ce jour, tiédir leur survivance.
Ils se lèvent parfois pour trotter de six pas,
S'approchant d'un reflet lanternant le sursis,
Un autre condamné qui ne les entend pas,
Une autre vie sans choix, un autre vieux assis.
Ils retournent vaincus et prêts à mourir seuls,
La solitude est là pour mieux les achever.
Le devoir des enfants, noyé sous les linceuls,
A sacrifié tous ceux ne pouvant plus donner.
- Arteaga.