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IL Y A MÊME DES GOSSES QUI MEURENT SANS JAMAIS AVOIR ÉTÉ ENFANT...
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Quelque part, entre les vrais morts et les faux vivants...
J'ai 4 ans
Et je m'appelle : 13/01/2054.
C'est le nombre du jour truqué qui a misé sur ma vie suspectée de trop vouloir.Mais je ne connais pas celui de la nuit désabusée qui viendra concrétiser l'inéluctable. Je ne connais pas ce numéro savant. Celui qui tourne et qui tourne jour après jour, au gré d'une boule implacable lancée tour après tour pour me faire son tout dernier numéro.
Je ne connais pas les composants de ce code arbitraire,
Celui qui va m'imposer son choix
Entre le rouge extrême ou le noir définitif.
L'alternative d'un dilemme également destructeur,
Entre la possibilité de mourir avant d'exister vraiment
Ou celle de pouvoir tenter bien survivre avant ma mort.
Avec, au-dessus de ma tête,
Ce numéro sanglant qui passe et repasse,
Commet un impair et parfois me manque.
Non ! Je ne connais pas ce quantième ultime,
Mais j'ai un pressentiment héréditaire.
J'ai une crainte sur ce pari mortel,
Sur cette gageure presque gagnée d'avance
Et sur les quatre derniers chiffres de ce numéro.
Ceux de mon tout dernier jour. Un jour comme ça, bientôt fatigué de compter sur mes doigts et d'avoir peur de sourire encore à ma vie. Ce pourrait bien être le 2055 ! Plus quelques heures tapantes, pour un bonus éventuel.
Mais beaucoup plus certainement,
Juste quelques dernières minutes faméliques
Et quelques petites secondes d'agonie accordées.
Si la chance tourne à l'envers,
Comme elle devrait le faire pour moi.
J'ai toujours mes parents.
Comme beaucoup d'enfants
De ces Patries d'abondance,
Comme bien peu de mes camarades éphémères.
Comme bien trop d'enfants privés sans raison.
Aujourd'hui tous amputés de cette folle joie
D'avoir le droit de rompre le pain quotidien.
De partager ce "sel de la vie" qu'un destin sélectif
A oublié de nous donner chaque jour qui se défait.
Alors, pour tenter le diable, nous tendons la main. Une main timidement repliée sous les appels de notre ventre protubérant en écrasant ce pauvre restant de dignité. Avec le seul espoir de ne pas mourir tout de suite.
- Arteaga.