Elle a, sans un remord, bitumé ses pâquis.
Parfumée de relents, saupoudrée de béton,
La ville acier grignote avec un lent mépris
La campagne amputée qui pleure ses maquis.
... et le soleil suinte en déraison.
Ses nuits sont transpercées d'étoiles métalliques.
De strass publicitaire en candeur fabriquée
Elle engloutit les cœurs aux désirs excentriques,
Noyant l'aube en déclin dans ses flots chimériques.
... et la lune apprête la curée.
Son sourire est vendu au marché de l'outrance.
Cravaché par un stress concevant des plaisirs
Son futur se soumet aux galops de l'urgence,
Désaxant les destins enivrés d'exigence.
... et l'espoir étouffe en ses désirs.
Quand un visage gris veut troubler son erreur,
Il kidnappe un "instant", suspendu aux devoirs
Et moule un jour sans loi pour guider sa torpeur
Loin des trottoirs huileux engorgés de moiteur,
... et le rêve ébauche ses pouvoirs.
Je ne supportais plus la ville et ses faux airs,
Le flonflon de ses rues encroûtait mes envies.
J'ai rongé le cordon me reliant à ses chairs,
Trop flasques et rougies des rigueurs de leurs fers,
... et j'ai hululé mes symphonies.
En ouvrant les rideaux d'un berceau de nature,
J'ai trouvé sous les draps recouvrant sa pudeur,
Le doux sein d'une vierge allaitant sa ramure
Dans le frais gazouillis d'un ruisseau de verdure
... et j'ai lapé l'eau en sa vigueur.
J'ai posé le barda d'un passé endurci
Dans l'erreur d'une vie façonnée sans raison
Et alors j'ai voulu labourer mon oubli
Pour planter mon vieux rire en ce cadre infini
... et y voir refleurir mon prénom.
Un arbre m'a offert le plus fort de ses bras,
Pour sculpter dans sa coupe un chez-moi sans crédit.
La fougère, une couche entourée de lilas,
Pour guérir mes sommeils saturés de fracas,
... et j'ai enfin pu rêver sans bruit.
Chaque jour un lutin vient guetter mon éveil,
Entre un lièvre ébahi, une biche étonnée
Et ce vieux sanglier qui flaire mon orteil
Avant de repartir sous les ris du soleil,
... et j'enivre ma vie de rosée.
Ma blessure a trouvé l'onguent qui cautérise
Les saignées de mon corps et la peur du destin.
Pour terminer mes ans au sein de ma promise,
Je vais poser mon cœur sur ses chevaux de bise
... et fondre mon âme au clair matin.