Noyé dans la ruée vers l'or de ce 21ème siècle,
D'une main désolée, il creusait les poubelles.
Cherchant le filon qui permet d'exister
En triant minutieusement l'inutile des autres.
Oublié dans l'enfer d'une retraite indigente,
Il voulait nourrir les derniers souffles de son couple.
Alors, promenant sa disgrâce au hasard des trottoirs,
Il fouillait entre les os réservés aux chiens.
Il avait amputé sans broncher quarante ans de sa vie,
Offertes au service égoïste d'un labeur carnivore
Et qui ne voulait plus lui rendre la pareille,
Malgré ces liasses de promesses dévaluées
Qui agonisaient dans l'oubli d'un coffre-fort.
Il avait demandé à trop de portes consternées
Qui ne voyaient pas plus loin que le bout de la loi
Et il avait reculé en reniflant son amour-propre,
Pour aller reprendre ce que jadis il avait jeté
Dans ces mangeoires offertes à ceux qui n'ont plus rien.
L'amour de sa vie s'était emmuré dans son vieux paradis.
Elle n'osait plus s'égarer au-delà de quelques centimes d'espoir
En ces endroits de vie facturés sans condition.
Alors il continuait à besogner pour survivre
Et s'offrir les moyens de mourir comme les autres.
S'éclipsant de ses rêves de voyages inachevés
Et de ses soirées d'amitiés devenues bien trop coûteuses,
Il avait recouché le soleil de ses espoirs
Dans l'ombre découpée par des rejets glacés
Et fourrageait dans les restes des vies ensachées,
D'une main tremblante qui trahissait sa dignité avariée.
( A_t_a )