Notre première rencontre s'est passée dans une vente aux enchères
J’étais la plus belle des statues mais aussi la plus délaissée
Personne n’a pu repéré ma chaleur ainsi que ma luminosité
Sauf lui, le plus élégant des acheteurs
Il était grand, brun, avec un teint mordoré
Ses cheveux avaient la couleur noir corbeau au plein de l'hiver
Il avait des poils sortant de sa chemise bien repassée
Un visage de rivage très sec d'un un sourire enlacé
Ses yeux habités par une vive clarté
Il regardait un peu de partout
Quand nos yeux se sont croisés ses battements de coeur stoppèrent
Ses mains précédèrent ses pensées pour toucher la chair de mon marbre
Il était si doux comme un doudou
J’avais envie de lui dire qu’il suffisait qu'il pleure pour que je devienne humaine
Mais la peur de la foule m'obligea à laisser régner une immuable paix
Il a payé très cher, bien que mon prix fut très élevé
C’est pour ça que je n’avais aucun espoir qu’on puisse me libérer
Une fois chez lui il me posa dans sa chambre à coté de son lit
L’endroit était chichement éclairé d'une antique veilleuse
Il m’admirait me toucher une fois sur les lèvres, une autre sur les seins
J’avais une nudité des fées de mirage du désert
Ses caresses m’ont tellement excitées à un point tel
Que mes lèvres et mes seins se gonflèrent
J’avais peur qu’il puisse remarqué mon éruption
Il est beau, son thorax était vaste comme un axe
Poilu comme la savane mes doigts voulaient se plonger à ce nid
Il s’allongea sur son lit comme un dieu avec une respiration sifflante
Ecarta ses bras, me regarda avec des yeux plus brillants qu’un diamant
En le regardant mon coeur cognait à grands coups dans ma poitrine
Quand soudain il commença à pleurer et se dirigea vers moi
Pour faire du creux de mes seins son refuge
En criant des mots de douleur "pourquoi m’as-tu laissé seul dans ce monde pourri
Je t’aime mon amour, ta mort et la mort de tout mon intérieur
Ton absence m’a vidé l’esprit, a fait de moi une carcasse dans une casse"
Je bougeais les bras en lui disant tu n’es plus seul
Je suis là maintenant je te tiendrais compagnie chaque nuit
Lèves-toi, approche frôle mes lèvres qui ont tant désiré les rivières de ton haleine
Fais moi l’amour avec les souffrances qui te frissonnent
Sonne ta cloche en ma personne
Il m’a pris dans ses bras comme un roi
Aussi fort que le vent du tonnerre
Évanouis entre les muscles de sa virilité
Il passait ses notes de chanteur à travers les pores de ma peau
J’avais les cheveux satinés de flamme, je lui réchauffais toute la surface de son corps
Dans chaque larme versé naquit une vie d’enfant
Ma langue léchait son cou pour atteindre ses chevilles éparpillées
On commença par gémir puis crier et enfin par hurler
C’était le séisme de la maturité
Un homme crée par la sculpture d’une femme, la vie marbrée
Et c’est ainsi que se féconda le fœtus de cette vie de nuit.


Sissi

----------------
-Combien d’êtres humains ignorent qu’ils n’ont d’humain que le nom ?
Henry Tena Gil