Le brasseur du vent
J’ai quitté mon chez-moi pour un site orpailleur
Ma raison m’a conduit tout bêtement ailleurs
Et j’ai cru aux rumeurs des faciles richesses
Comme mon rêve est gai et friand de paresses !
J’ai laissé le plus cher, le berceau, le bercail
Et les infimes sous que m’offrait mon travail
Pris l’incertain chemin balisé de chimères
Et atteint éreinté les eaux des rivières.
J’ai tamisé l’espoir charrié par les flots
Serpentant dans leur lit espérant le gros lot.
Des poissons argentés ciraient leurs étincelles
Et le ruisseau passait empli de bagatelles.
J’ai brisé mon outil blasé et épuisé
Puis de nouveau chez moi, je me suis excusé
En lustrant le bouquin de Jean De La Fontaine
Où sont ces hommes-là , ça me fait de la peine !
la feuille déclinait en perdant sa couleur
Et disait sa douleur à moi seul, orpailleur
D'un instant de folie, rêvassant d’opulence:
Qui me sert à boire et comprend mon silence ?
le sol ne me nourrit que quand le soc agit
L'or pleut, le champ sourit, le pays réagit
Mais j’ai cru aux rumeurs miroitant des aisances
Oubliant le silo, la moisson qui régresse.
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Ecrire c'est dire silencieusement à ceux qui veulent bien vous écouter.