Plume d'or Inscrit le: 9/5/2007 De: ALGERIE |
PROCES FEODAL PROCES
Dans les méandres des ténèbres de son cachot humide, il gisait, inerte. Il n’était pas mort Il renaissait Il revivait au paradis de ses pensées Ses os qu’ils ont brisé, ces rats qui croquaient sa chair, ce froid qui le macère, son corps qui l’a délaissé, n’ont pas eu raison de son imaginaire ni de son innée sensibilité, "Téméraires obscénités" de l’avis de ses bourreaux
Les dédales obscurs vibraient de leur vaniteux écho. Ils ricanaient Ils festoyaient de l’avoir enterré Croient-ils ? Ce qu’ils peuvent être sots !
Il se remémore son procès Il se souvient d’être accusé Les suzerains et les vassaux, la foule et les badauds étaient tellement exaspérés des blasphèmes qu’il a pu proférer à une femme qu’il a croisée au crépuscule des bois mais sans avoir su, charmé à son insu, qu’elle était la fille du roi.
Le juge cita ses crimes sous l’assemblée unanime : « Il s’est permis d’égaler ses lèvres charnues sans aucune retenue à de vulgaires pétales de roses ranimées par les chauds rayons de soleil d’un matin de Mai. »
- O-o- ohh ! Fusait de partout
« Il a dit sans réserve Dieu par sa grâce m’en préserve ! que les courbures de sa silhouette sculptées par le vent de l’ouest lui rappelait une païenne statuette d’une soi-disant déesse d’une croyance interdite qu’on nomme –je cite : Ap..aphro...dite. »
- Sacrilège ! Criaient les masses
« Il a eu l’audace de déclarer que sa chevelure dorée était comparable au tapis satiné d’un champ de blé bercé par la brise d’un été naissant et au rythme d’une symphonie éternelle, dansant. »
- Qu’on le pend ! À l’instant !
Ils ne l’ont pas pendu Ils l’ont traité de damné Et ils l’ont condamné à pourrir dans l’oubli jusqu’à ce que mort s’en suive ou à la folie Ils étaient stupides et il était fier. Sa lumière il l'avait dans son coeur, ses souvenirs lui procuraient la chaleur, ses compagnons, c'étaient ses vers oui! Il était fier d’être sensible à tout ce qui est beau, de ne point contenir les rimes et les mots, et d’être coupable de cet outrage, de ce blasphème, et de cette hérésie qu’on appelle… la poésie.
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