Le Caméléon et le Ara
Déconcertant parfois ses confrères lézards
Par les multiples couleurs dont il se parait,
Un Caméléon au sommet de son art,
Portait jusqu’à l’invisible sa dextérité.
Aucune teinte ne lui Ă©tait inconnue,
MĂŞme le bleu du ciel Ă©tait Ă son menu,
Il pouvait ainsi passer de branches en fleurs,
Sans jamais se tromper, sans la moindre erreur.
Or, voilà qu’un jour, arrive sur son habitat
Un hôte distingué qu’il n’attendait pas,
Un superbe Ara aux rutilantes couleurs,
Proposant Ă son domaine un effet enchanteur.
Pour le Caméléon, qui se pensait unique,
La venue du perroquet créait une réplique
De ce monde oĂą se cacher Ă©tait une vertu
Amenant ses sujets Ă demeurer inconnus.
Désorienté, ne sachant où donner de la tête,
Il se met à l’épier, à faire son enquête
Pour tenter de le battre sur son propre terrain,
Plus il en faisait, plus ses efforts restaient vains.
Un jour pourtant, parvenu jusqu’à la canopée,
Là où le grand oiseau préférait s’exposer,
Il crût enfin avoir atteint l’ultime phase,
Créatrice d’un enchanteur état d’extase.
Pour lui maintenant, rien n’était impossible,
Quel que soit l’objet, quelle que soit la cible,
Il était persuadé de pouvoir l’imiter,
Plus rien ne semblait devoir l’arrêter.
Ainsi, voyant le Ara s’envoler dans les airs,
Planer dans l’azur sans aucune frontière,
Convaincu qu’il était entré dans son bestiaire,
Il s’élançait à son tour et s’écrasait à terre.
Quand la vanité surpasse le jugement,
On doit s’attendre à de cruels moments.
Chibani